La vie meilleure – Etienne Kern

Etienne Kern a le goût des personnages passionnés, peut être le goût des perdants Dans son premier roman : l’envolé  il s’était attaché au destin tragique d’un inventeur de parachute, héros malheureux des débuts de l’aviation. Dans son deuxième roman: La vie meilleure c’est au personnage d’Emile Coué qu’il s’intéresse. Celui-ci n’est pas vraiment inconnu puisque tout le monde peut citer “la méthode Coué” avec ironie. Mais on ne sait plus que l’inventeur de la fameuse méthode a joui en son temps d’une véritable gloire internationale.

On suit donc dans ce roman biographique l’enfance,  les débuts professionnels d’Emile qui devient pharmacien à Troyes à la fin du 19ème siècle puis sa réussite étonnante.  Un homme doux, tout sourire qui comprend peu à peu qu’il faut parfois dire aux gens ce qu’ils ont envie d’entendre, leur affirmer qu’ils ne sont pas vraiment malades, qu’ils peuvent avoir “une vie meilleure”.  Le poids des mots, le pouvoir de l’imagination, l’autosuggestion, notre pharmacien va en faire son domaine d’observation et sa pratique.

Le narrateur est un conteur habile qui sait inventer son personnage à partir des quelques documents dont il dispose. Il en fait un homme passionné, convaincu  et qui adore convaincre, trois ou quatre clients dans l’arrière-boutique de la pharmacie puis des salles pleines. Rien ne l’arrête, ni l’usage des placébos, ni les essais d’hypnose ni les phrases miracles; Il veut améliorer la vie des gens grâce à sa méthode de mieux en mieux définie.. Rarement découragé, infatigable,  opiniâtre et enjoué il sera bientôt adulé par le public.

Parallèlement à ce parcours unique, l’écrivain mêle à son récit des éléments plus personnels voire autobiographiques. Il parle à la première personne de la genèse de son livre, de ses déplacements sur les lieux où ont vécu Emile et sa tendre Lucie comme pour les rendre plus présents. Il nous fait ainsi partager les étapes de son enquête. Et puis il évoque des proches qui lui ont été chers, Irène surtout que la vie n’a pas épargnée mais qui a toujours su garder le sourire et trouver la joie dans son quotidien… Des clins d’œil entre le passé et le présent qui densifient la lecture.

Et finalement que penser de ce pharmacien aux mille formules? Fut-il un psychologue éclairé, un charlatan, un précurseur, un illuminé? A chacun sa réponse mais il paraît difficile de résister totalement au fascinant personnage que nous présente ici Etienne Kern.

Françoise Rebaud. Comité de suivi

©Photo ER /Alexandre MARCHI